RIDM 2020: « Softie » de Sam Soko

Présenté aux RIDM, le film Softie de Sam Soko retrace le parcours de Boniface Mwangi, photographe, journaliste et activiste au Kenya, lors de sa première campagne pour devenir député. Sa volonté ? Aider son pays à lutter contre la corruption et les violences menées par les autorités contre le peuple.

C’est un homme représentant un pays meurtri par des années de violences subies lors de contestations électorales que le public découvre dans ce documentaire. Boniface Mwangi est un photographe qui se veut défenseur de la démocratie et ne pouvant plus tolérer les malversations politiques et éthiques de son président Uhuru Kenyatta. Ce dernier est un homme au pouvoir depuis 2013 et fils du premier président Kenyan Jomo Kenyatta qui a gouverné le pays de 1964 à 1978.

Le réalisateur Sam Soko suit pendant plusieurs mois, l’évolution de ce jeune activiste, de sa décision d’arrêter son métier de journaliste-photographe aux résultats de l’élection à laquelle il se présente en tant que député.

À travers le regard de la femme de Boniface, de ses enfants, de sa responsable de campagne et du principal protagoniste, le réalisateur montre des images et témoignages forts pour mieux montrer la persévérance et l’envie d’un homme de changer ce pays.

« Papa, tu vas où ? Je vais renverser le gouvernement.”

C’est par ses mots que Boniface Mwangi explique à l’un de ses enfants, sa volonté de s’engager en politique. Frappé aux sens propre et figuré par la violence gouvernementale envers ses concitoyens, fatigués d’élections corrompues depuis plusieurs années, il fait le grand saut et se présente comme député dans son comté de Starehe.

Face à lui comme candidat, un homme (Jaguar) soutenu par le parti du président, non pas reconnu par la qualité de son programme électoral, mais plus pour ses chansons qu’apprécient particulièrement le dirrigeant.

La femme de Boniface, Njeri, joue un rôle prépondérant dans le documentaire. Activiste également, elle se confronte à la volonté de son mari de faire passer son pays avant sa famille. C’est une chose difficile à accepter pour cette mère qui s’occupe seule de ses trois enfants, suite aux absences de leur père qui n’a la tête qu’à sa campagne électorale.

De témoignages face caméra à des moments intimes d’explications, Sam Soko nourrit cette ambivalence résumée si bien par Njeri : « Tu consacres ta vie à ton pays[…] je consacre ma vie à ma famille. »

Une campagne électorale pas comme les autres

La force du documentaire réside dans la puissance des images et des situations que rencontre Boniface. Se faire connaître auprès des électeurs est une tâche ardue pour lui. La seule question que lui posent les citoyens, après avoir pris connaissance de sa candidature, lorsqu’ils le rencontrent : « As-tu de l’argent ?” ou la variante “As-tu un t-shirt ?”.

Il faut savoir que la plupart des candidats n’hésitent pas à jeter billets et habits, du haut de leur camion de campagne, quand ils traversent les rues. Boniface ne voulant pas tomber dans cette démagogie a d’autres méthodes pour se démarquer. Des idées, il en a, dont celle innovante de faire du démarchage téléphonique, ce qui lui permet d’engendrer énormément de dons.

Un pays menaçant

Sa notoriété grandissante engendre les premières menaces, mettant en danger sa famille, dans un pays où les disparitions mystérieuses et meurtres d’activistes sont réguliers.

Sam Soko filme une séparation imposée entre Boniface et sa famille, partie aux États-Unis pour plusieurs mois. Lui reste pour assurer le suivi de sa campagne. Elle sera longue et difficile pour le jeune homme si bien qu’il aura l’occasion d’ouvrir les yeux sur son rôle de père de famille.

Parfois dur, par moments cocasses, comme le retour à la maison de la famille de Boniface après un exil aux États-Unis dans leur maison bondée de dizaines bénévoles au téléphone, le film est surtout foncièrement humain. Softie frappe par sa réalité.

Il y a des images d’archives de manifestations postélectorales, des conflits avec la police parfois difficiles à regarder et des faits avérés de corruption depuis plusieurs années.

Que ce soit Boniface ou d’autres intervenants, ils arrivent tous à sensibiliser sur une situation difficile dans un pays où la révolte citoyenne gronde.

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