Rwanda : l’obésité, un problème de société et de santé publique

L’obésité, qui gagne du terrain au Rwanda, touche surtout les gens aisés pour qui être riche, c’est pouvoir manger tant et plus. Sans avoir conscience des risques pour leur santé. L’association rwandaise des personnes obèses les met en garde et s’insurge des discriminations dont sont victimes les gros.

A la surprise générale, une femme d’environ 25 ans, arrivée dans la salle de l’Hôtel Chez Lando début septembre 2012, n’a pas pu trouver une chaise où s’asseoir parce qu’elle était très grosse. « Je voyais des images pareilles sur internet et je me disais que c’est du trucage », s’étonne une femme qui était venue à la conférence tenue par les personnes obèses du Rwanda.

Coutoisie : OMS

« Les menaces du surpoids et de l’obésité pèsent sur le pays, avertit pourtant un cardiologue de Kigali. Un grand nombre de jeunes et de femmes des milieux urbains prennent du poids. Cela doit être la raison de l’actuelle montée en flèche des maladies cardio-vasculaires ».

Même si dans la société rwandaise, grossir était perçu comme un signe de richesse, l’association SOS obésité, qui regroupe 40 géants rwandais, prévient que trop grossir est un sérieux problème de santé publique.

Aux maladies incurables s’ajoute la discrimination. Rukundo, 135 kg, a ainsi été contraint par les agents aéroportuaires à payer des kilos supplémentaires en plus de sa petite valise. Pour les douaniers, « son poids dépassait la norme pour un passager ».

Cette femme obèse confie aussi: « Chaque fois que j’entre dans un bus, les passagers me disent que je dois payer le double. Cela me vexe tellement que je n’ai plus l’envie de voyager ». « Ils sont la cible des moqueries du reste du monde et ne trouvent pas ce qu’ils cherchent au marché », explique un membre de SOS Obésité.

« Je peux chercher dans dix magasins avant de trouver une chemise qui me va « , a reconnu une femme obèse. « Quant aux projets, je ne fais pas de grands rêves car j’ai peur de mourir prématurément d’une maladie cardiaque ou de l’obésité », se résigne-t-elle.

Les personnes obèses mettent aussi en garde contre des problèmes physiques. « Quand j’ai des relations sexuelles, à la fin je tombe presque dans le coma », révèle un commerçant obèse.

Eviter de manger sauvagement et les émotions

La plupart des membres de l’association SOS Obésité témoignent qu’ils ont été victimes d’une mentalité selon laquelle être gros, c’est être prospère. En effet, quand certaines personnes sont embauchées et gagnent de l’argent, ils consomment sauvagement ce qu’ils n’ont pas eu pendant l’enfance.

« Dans ce cas, les cellules du corps récupèrent trop vite et la personne gonfle comme un ballon », avertit Samson Bimenyimana, un nutritionniste de l’association. Bonaventure Rukundo, la trentaine, père de six enfants, pèse 90 kg. « Quand j’ai obtenu un emploi dans une ONG, chaque week-end je sortais avec de ‘bons buveurs’ ; nous buvions à notre soif et mangions à notre faim. En six mois seulement, j’ai pris dix kilos », témoigne-t-il, très inquiet de ses 135 kg.

Pour ce membre de l’association des obèses, « il faut éviter les plats avec des lipides saturés ainsi que les glucoses ». Les amateurs d’akabenzi, viande de porc, de frites et autres aliments gras sont avertis. Il en est de même de la gestion des émotions.

Selon Floride Yamuragiye, une spécialiste en psychologie, 70% des maladies physiques qui attaquent les humains sont causés par les sentiments négatifs. « Quand quelqu’un est fâché, il dégage des hormones qui produisent des substances favorisant l’obésité », livre la spécialiste. Avis soutenu par une femme obèse qui avoue qu’elle mange bizarrement quand elle est en colère. Catherine Kabega, la trentaine, révèle : « A 14 ans j’avais déjà 103 kg. Très récemment, un psychologue m’a indiqué que je suis victime d’un sentiment de deuil ».

SOS obésité recommande aux victimes de se soumettre à un régime alimentaire strict, accompagné d’activités sportives intenses. C’est ainsi que JMV Zigirinshuti a réduit son poids de 125 à 108 kg en un an. Dans sa famille, ils ont résolu de manger le matin 30% de la quantité globale de nourriture de la journée, 50% à midi et 20% au repas du soir.

Selon Anastasie Mukakayumba, une nutritionniste diététicienne, le problème d’obésité se rencontre surtout chez les personnes aisées. Parmi les 800 clients qu’elle a eu en huit mois figure les élèves ressortissant des écoles les plus chères de Kigali, où un enfant de moins de dix ans peut peser plus de 60 kg.

Par Jean de la Croix Tabaro

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
Veuillez entrer votre nom ici