Rendez-vous avec l’heure qui blesse: le destin incroyable de Raphaël Élizé

Dans son roman Rendez-vous avec l’heure qui blesse, publié dans la collection Continents noirs de Gallimard, l’auteur camerounais Gaston-Paul Effa rend hommage au Martiniquais Raphaël Élizé et revient sur son destin incroyable.

Rendez-vous avec l'heure qui blesseLe narrateur – héros du roman – l’annonce dès les premières lignes : l’histoire d’une déchéance est ici racontée. Un résistant français est torturé par la Gestapo avant d’être envoyé dans un camp nazi à Bunchenwald, en 1944, où il meurt quelques mois plus tard lors des bombardements alliés.

«Rendez-vous avec l’heure qui blesse» est aussi le récit romancé d’un destin hors du commun. L’écrivain Gaston-Paul Effa rend hommage à Raphaël Élizé, homme politique né en Martinique. Ce petit-fils d’esclaves a fui les dégâts causés par l’éruption de la montagne Pelée, en 1902, rejoignant alors Paris avec sa famille.

Devenu vétérinaire, il a travaillé dans les milieux ruraux. À Sablé-sur-Sarthe, peu d’habitants avaient déjà vu un noir dans leur entourage. Raphaël Élizé a relevé le défi et vaincu de nombreuses réticences. L’homme de gauche engagé est même devenu l’un des premiers maires noirs de France, en 1929.

En jouant avec les marqueurs temporels, Effa raconte à sa manière cette découverte de la France rurale à peine ouverte sur le monde et l’affaissement d’un homme devenu un moins que rien dans le camp de la mort.

Ces allers-retours entre les époques permettent également au romancier de faire une comparaison entre les hommes et les animaux dont les langages et les actes ne seraient pas si éloignés. Le cri maternel d’une vache qui vient de voir mourir son veau en constitue un exemple, tout comme Raphaël Élizé parqué dans un train nazi, tel un de ces bovins traités quand il était vétérinaire. Sans parler, évidemment, de Buchenwald, où l’homme n’en est plus un, et où les chiens bénéficient de davantage d’attention.

Le récit de la vie d’Élizé dans le camp nazi s’avère être toutefois la partie la plus problématique du roman. Faire parler son héros à la première personne pour imaginer – de manière quelque peu grandiloquente – ce qu’il a pu ressentir dans ce lieu où s’est déroulé l’inimaginable (au sens propre du terme) a quelque chose de dérangeant.

Ce «je» est au final bien plus celui du romancier que du protagoniste principal, un mélange malvenu.

Il ne reste alors au lecteur qu’à se souvenir d’un destin hors du commun, un exemple pour la communauté noire française. Là est le mérite de «Rendez-vous avec l’heure qui blesse».

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