Un pays pour mourir d’Abdellah Taïa, chez Seuil

Après avoir réalisé en 2013 son premier long métrage L’Armée du Salut, basé sur son roman du même titre, l’écrivain marocain Abdellah Taïa est de retour dans les librairies avec Un pays pour mourir, publié chez Seuil.

Disponible depuis février dernier, le septième roman de l’écrivain suit le parcours de quatre personnages. Quatre fragments de vie qui s’entrechoquent et ayant comme point central Zahira, prostituée au grand cœur et principale protagoniste du roman.

Un-Pays-pour-mourirIl y a également Aziz, un transsexuel algérien, également prostitué, qui est sur le point de changer de sexe. Mojtaba, un jeune étudiant homosexuel iranien, a fui son pays après les manifestations de 2010. Et Zineb, la tante de Zahira qui avait mystérieusement disparu dans les années 1950, clôt le roman de 164 pages.

Dans son livre, Abdellah Taïa aborde des sujets qui lui sont chers: son pays natal le Maroc, l’immigration, la sexualité, l’homosexualité, la politique. Les quatre personnages du roman sont en quête de liberté.

«Je suis libre. À Paris et libre. Personne pour me ramener à mon statut de femme soumise. Je suis loin d’eux. Loin du Maroc», clame le personnage de Zahira.

Tous ont fui leur pays dans l’optique d’un avenir meilleur. Trois d’entre eux ont atterri à Paris, la Ville-Lumière. Représentant l’eldorado pour ces exilés, la France n’est en réalité qu’un pays auquel ils n’appartiennent pas. Leur passé et leur culture les hantent et les empêchent de vivre leur vie pleinement, comme ils le souhaiteraient.

Aziz, qui se prépare à devenir une femme, illustre la désillusion de l’immigrant de façon frappante. «Il faut qu’ils paient, tous ces hommes, ces frustrés, ces affamés du sexe, ces connards. Je veux tout leur argent. Tout. Le maximum de fric. Je ne les aime pas, de toute façon. Ni à Alger, où je me suis fait violer gratis durant des années, ni ici dans ce trou qu’on ose encore appeler la plus belle ville au monde.»

L’identité transgenre, un sujet délicat

En abordant le sujet délicat de l’identité transgenre, Abdellah Taïa va encore plus loin que dans ses précédents ouvrages. Même si on en parle de plus en plus, notamment grâce à Bruce Jenner ou à la série «Transparent», les transgenres sont très peu visibles dans nos sociétés. Abdellah Taïa apporte donc sa pierre à l’édifice et brosse le portrait touchant, réaliste et parfois cru d’Aziz, ce garçon qui a toujours été une fille.

«Je la coupe. Tu m’entends, Zahira? Je n’en veux plus. Quel soulagement! Quel pied! Quitter enfin ce territoire maudit des hommes! Sortir. Partir. Changer. Me révéler enfin. Qu’ils le veuillent ou pas. Je serai un autre. Moi-même. JE LA COUPE. Sans bite. Sans verge. Sans zob. Sans excroissance. Sans sperme. Sans couilles. Sans cette chose inutile entre les jambes qui me bousille la vie depuis toujours.»

Contrairement à ses premiers livres qui se voulaient plus autobiographiques, «Un pays pour mourir» est un ouvrage davantageplus fictionnel, dans la même lignée que ses précédents romans «Infidèles» (2012) et «Le Jour du Roi» (2010). Grâce à ses personnages complexes, ses phrases courtes et ses images fortes, «Un pays pour mourir» est une œuvre atypique, mais nécessaire, qui ne manquera pas de vous surprendre.

 

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