L’Énéide au Théâtre de Quat’Sous, une épopée miroir de l’actualité

Créée, il y a 12 ans à L’Espace libre, par Olivier Kemeid, la pièce L’Énéide s’inspire librement de l’épopée tragique de Virgile. De retour au Théâtre de Quat’Sous, avec une nouvelle distribution, elle traite de l’exil migratoire, un sujet collant parfaitement à l’actualité.

Crédit: John Londono Consulat
Maxime David Séisme

L’épopée d’Énée (héros de l’Antiquité grecque et romaine) a inspiré grandement cette pièce narrant l’histoire de ce personnage qui doit quitter sa ville en feu, pour migrer vers de nouveaux horizons.

Endeuillé par la perte de sa femme, Énée, interprété par l’excellent Sacha Samar, doit trouver une nouvelle terre pour son fils. 

Accompagnés de son père, de son meilleur ami et de deux femmes inconnues, ils naviguent tant bien que mal à la recherche d’un nouveau départ, d’une nouvelle vie.

Dans une ambiance sonore prenante et bien réfléchie, la pièce embarque le public dans un mélange de genres audacieux et plutôt convaincant. Mêler l’épopée latine de Virgile, avec par exemple les prénoms d’origines, avec le contemporain, comme la scène des vacanciers dans un tout-inclus, est osé et peut troubler certains, surtout avec un sujet aussi brûlant actuellement. 

L’Énéide est une histoire de migrants avec ce que cela entraîne, des insultes, des conflits, du racisme, mais aussi des rencontres, de l’amour ou tout simplement de l’empathie. Olivier Kemeid veut aussi à travers cette pièce offrir au public une réflexion sur ce qu’est une telle situation.

La multitude d’acteurs, dont Mounia Zahzam, Tatiana Zinga Botao et Anglesh Major, sur scène offre un rythme soutenu et toujours mis en avant par une trame musicale percutante. Quelques clins d’oeil humoristiques sont bien accueillis par le public, lors de scènes un peu surréalistes opposants les migrants à de simples touristes. 

La violence dans les mots, la violence de certaines situations et la tristesse d’Énée offrent un contre-équilibre intéressant et pertinent. Les rencontres aussi faites par le groupe d’Énée, comme celle avec une prophétesse donnant à Énée un champignon pour communiquer avec les morts, appuient ce sentiment de légèreté voulu par le metteur en scène.

Olivier Kemeid s’est permis quelques libertés dans son écriture et le traitement de cette situation migratoire. Cela ne l’empêche pas d’être juste quand il faut savoir traiter le sujet de manière plus dure et sombre. La vie de migrants est extrêmement difficile et on le ressent à travers le jeu des acteurs. 

Cette histoire de personnes, d’humains qui n’ont pas le choix de partir de chez eux est un miroir de notre société. Olivier Kemeid avec peu de moyens et une belle imagination, arrive à retracer ce que peut être le quotidien de migrants. Personnes abandonnées, souvent seules face à leur futur, devant assurer leurs survies, le regard des autres et souvent la perte de proches.

L’Énéide n’est pas l’épopée la plus joyeuse, c’est aussi la plus proche de nous. Elle nous touche et on ressort du Théâtre de Quat’Sous, ébranlé par une troupe de comédiens et par une histoire qui ne peut que tous nous sensibiliser.

L’Énéide d’Olivier Kémeid : 

Distribution: Sasha Samar, Étienne Lou, Anglesh Major, Igor Ovadis, Olivia Palacci, Marie-Ève Perron, Luc Proulx, Philippe Racine, Mounia Zahzam et Tatiana Zinga Botao

Pièce présentée jusqu’au 28 septembre : https://www.quatsous.com/spectacles/l-eneide

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