Salon de la femme noire: un forum où la femme racisée noire est à l’honneur

Après une première édition couronnée de succès, la seconde édition du Salon international de la femme noire se tiendra au Grand Quai du Port de Montréal, le 9 juin prochain.

Créé par des femmes inspirantes et déterminées, l’évènement présente des ateliers sur des sujets d’actualité, des panels sur des questions délicates, mais essentielles, ainsi que des kiosques d’exposants, tenus majoritairement par des femmes entrepreneurs qui présenteront leurs produits et services.

Entrevue avec deux des fondatrices, Dorothy Rhau (DR) et Catherine Kamtchueng (CK).

Pourriez-vous nous dire comment l’idée du Salon a vu le jour?

DR: Suivant les funérailles de ma mère en 2016, je cherchais du maquillage à la pharmacie. À mon grand étonnement, j’ai réalisé qu’il n’y avait pas de produits pour les femmes de peau noire. Même les conseillères en cosmétiques n’étaient pas informées pour me donner des conseils. J’étais estomaquée.

Dorothy Rhau 

Instantanément, l’idée de créer un forum qui permettrait à des exposants de venir faire la promotion de produits cosmétiques pour la peau noire m’est venue, mais au-delà de la beauté, créer un espace où les Noires peuvent se rencontrer, échanger, débattre sur des enjeux ou autres sujets.

Le lendemain, une page Facebook (était lancée, NDLR) et j’embarquais des femmes compétentes dans l’aventure!

À qui s’adresse le Salon?

DR: Notre mission est de mettre en lumière des femmes noires qui brillent dans l’ombre. Actuellement, au Québec et au Canada, ce sont les femmes racisées, en l’occurrence les Noires, qui subissent l’invisibilisation de leurs réalisations, de leurs personnes, de leurs produits.

C’est pour cela que notre clientèle cible ce sont les femmes afrodescendantes. Et plus encore, nous mettons réellement en pratique la diversité et l’inclusion. C’est pour cela que le Salon international de la femme noire est plus qu’un événement. C’est un mouvement féminin inclusif.

Le salon est ouvert à tous. Messieurs, vous êtes bienvenus! C’est une opportunité d’apprendre à connaître son prochain. Aucune autre initiative semblable au Salon n’existe au Québec.

Nous voulons sensibiliser toute la société communauté québécoise à la réalité de la femme noire, ses difficultés, ses défis, mais aussi sa culture et le bénéfice de son apport sociétal. Par «femme noire», nous voulons dire la femme afrodescendante, la femme racisée.

Dans les dernières années, beaucoup de mouvements féminins ont vu le jour. À titre d’exemple, il y a le mouvement #metoo crée par Tarana Burke et la Gouvernance au Féminin par Caroline Codsi. Croyez-vous que la femme racisée a plus de difficulté à faire sa place?

DR: Absolument! Et pour certaines, elles ont plus qu’un double standard. Tout Noir sait qu’il doit travailler le double si ce n’est pas le triple pour se démarquer. C’est utopique de croire que toutes les Femmes sont pareilles.

Tarana Burke a créé le mouvement #metoo, il y a des années. Mais pourtant ce n’était pas vu comme un mouvement. Combien de femmes noires ont été agressées et leurs voix ne sont pas écoutées. Prenons le cas des victimes de R. Kelly.

Tarana Burke, celle qui a lancé le mouvement #metoo

Il a fallu une Alyssa Milano pour donner vie au #metoo. Et oui, la parité hommes-femmes prônée par la Gouvernance au féminin a fait de beaux progrès, mais voit-on les femmes racisées? Donc oui c’est plus difficile pour nous de prendre place, car nous n’avons pas les mêmes opportunités.Non, je ne crois pas. Une femme qui est bien dans sa peau et qui connaît sa valeur fera sa place. À titre d’exemple, l’année dernière, un bon nombre de femmes racisées se sont présentées en politique municipale.

CK : La femme noire manque d’audace. Plusieurs femmes racisées qui immigrent au Québec ne connaissent pas quelqu’un qui peut les aider à se mettre en valeur. De plus, lorsqu’on immigre, quittant souvent chez soi en quête de meilleures conditions, l’adaptation à un nouvel environnement demande beaucoup de résilience et de patience. Cela crée souvent à la longue chez la femme noire, un profond découragement, le sentiment d’être disqualifiée et de ne pas être vue.

Qu’en est-il de la situation des femmes noires en STEM (science, technologie, ingénierie et mathématiques)?

CK : Il n’y en a pas assez. Trouver un emploi en STEM peut être très difficile. C’est pour cette raison que le Salon les met à l’honneur cette année.

Ce manque de représentation dans ce domaine a donc des répercussions auprès de la relève. Même avec plusieurs diplômes et des études supérieures, une femme racisée doit souvent commencer au bas de l’échelle, particulièrement si elle est immigrante.

Qu’est-ce que le Salon représente pour vous?

CK : Le Salon, c’est une plateforme pour permettre à toutes les femmes racisées de célébrer leur identité. À défaut de ne pas trouver son identité, on risque de s’en approprier une autre.

Il est donc très important d’apprendre à se connaître, de rencontrer des personnes qui nous ressemblent d’autant plus que les femmes racisées vivant au Québec doivent conjuguer avec la réalité de marier deux cultures. Le Salon ce n’est pas que pour nous, c’est aussi pour les générations à venir qui seront les piliers de la société de demain.

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