Kinshasa : quarante tués chaque mois sur la route !

Chaque mois, à Kinshasa, près de 40 personnes sont tuées sur la route. Pour tenter de faire changer le comportement de certains chauffeurs irresponsables, les autorités viennent de lancer une campagne d’information. Viendra ensuite le temps de la répression…

Syfia Grands/RD Congo

Ils investissent très tôt le matin les grandes artères et carrefours de la capitale congolaise, Kinshasa. Depuis le 26 janvier dernier, date du lancement de la campagne de civisme sur la route, des agents de la CNPR (Commission nationale de prévention routière) sont sur le terrain, arborant des gilets verts fluorescents, coiffés de casquettes de la même couleur, munis de dépliants et de mégaphones.

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But de l’opération : protéger les usagers de la route contre les accidents en constante augmentation dans la capitale. Les dernières statistiques rendues publiques par la CNPR sont en effet effrayantes. En 2012, Kinshasa a enregistré 2 916 accidents faisant au total 444 morts (soit 37 décès/mois !), contre 2 528 accidents en 2011 et 397 morts.

« Une charge pour la société »

Selon Myriam Shakila Yunus, directeur des études à la CNPR, le gouvernement a lancé cette campagne pour lutter contre les accidents sont devenus aussi un sérieux problème de santé publique.

En 2012, ces derniers ont fait dans la capitale 1 516 blessés graves. « La prise en charge des victimes devient une charge pour la société », fait-elle remarquer. Et d’ajouter, « dans la plupart des accidents que nous connaissons, 40 % des accidentés restent avec un handicap. Ils ont des traumatismes liés à l’accident et des séquelles ».

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), si des efforts ne sont pas fournis par les nations du monde entier, d’ici 2020 les accidents de la route prendront la 5ème place des causes de mortalité ! Face à cette situation, la CNPR informe tous les usagers de la route : les conducteurs et les piétons. Des études de cette Commission indiquent que 90 % de ces accidents sont imputés à l’homme et seuls 10 % sont dus à l’état technique des véhicules et à l’environnement.

La RD Congo, pays à faible revenu, ne possède que 5 % de véhicules neufs. Beaucoup de ceux qui circulent sur les routes sont d’occasion et dans un état technique très dégradé… C’est notamment le cas des minibus, bus et taxis qui desservent les différentes lignes de la ville de Kinshasa.

L’homme, premier responsable

Les chauffeurs de bus de type Mercedes 207 D, arrivent en haut du classement des conducteurs les plus dangereux. A tel point que leurs véhicules sont appelés « Esprit de mort » à Kinshasa, à cause des nombreux accidents qu’ils provoquent… « Ils conduisent comme des fous et ne veulent jamais être dépassés.

Pour éviter cela, soit ils bloquent le passage à d’autres véhicules ou se lancent dans des courses-poursuites sans prendre conscience des risques qu’ils encourent », déplore un piéton. Un grand nombre de ces conducteurs ont d’abord été receveurs (convoyeurs chargés d’encaisser l’argent de la course) et n’ont pas forcément suivi une formation en auto-école. « Conduire ne nécessite pas de faire des études. A l’auto-école, on ne fait qu’apprendre les panneaux de signalisation et comment utiliser le levier de changement de vitesses », ironise un de ces receveurs devenu chauffeur. Ils deviennent donc chauffeurs sans aucune certification, ni notion du Code de la route.

L’élargissement de certaines avenues de Kinshasa ne semble pas non plus arranger les choses… A l’image des boulevards Lumumba et 30 juin, passés de deux à quatre voies et qui font partie, selon la CNPR, des voies les plus dangereuses de la capitale en raison des fortes vitesses que les conducteurs y ont adoptées.

Pour nombre d’usagers de la route, au-delà de la sensibilisation, l’autorité publique doit faire respecter la loi. « Dans notre pays, on ne sanctionne que pendant quelques jours. Après, c’est du laisser-aller, voilà pourquoi personne n’a peur de violer le Code de la route. »

Ce n’est pas l’avis du ministre des Transports Justin Kalumba qui répond : « A travers cette moralisation du comportement routier, l’objectif est de réduire de moitié le nombre des personnes tuées sur la route dans les cinq prochaines années. Il s’agit de prêcher le civisme routier. Nous mettrons d’abord l’accent sur l’éducation avant la répression. A l’issue de cette campagne, la délinquance et l’incivisme sur la route seront exemplairement sanctionnés. »

Par Didier Kebongo

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